Biométrie – Le fichage généralisé des Français publié au Journal Officiel

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Ce type de fichage généralisé en France, exploitant un méga-fichier rassemblant les données privées d’identification de la majeure partie des citoyens Français ne s’était pas vu depuis 1940. Le gouvernement Valls vient de remettre sur pied ce fichier centralisé, au mépris des recommandation de la CNIL.

Alerte vie privée et fichage ! Même les “gens honnêtes” seront dedans : ce fichier commun aux passeports et aux cartes nationales d’identité a pour de faciliter l’établissement et le renouvellement des titres ainsi que de prévenir les fraudes.

« Titres électroniques sécurisés » (TES)

Repérée par NextInpact, la publication du décret a eu lieu au Journal Officiel le weekend passé. Déjà présenté en 2012, ce projet d’envergure avait été largement dénoncé par des sénateurs et députés socialistes comme “une ingérence dans l’exercice du droit de toute personne au respect de sa vie privée”.

« La France n’a créé qu’une seule fois un fichier général de la population, c’était en 1940. Il fut d’ailleurs détruit à la Libération » s’était souvenu le député Serge Blisko (PS). Réponse de Christian Vanneste (UMP) : « Ce n’est pas parce qu’il y a eu hier une dictature à Vichy qu’il ne faut pas protéger aujourd’hui les honnêtes gens ».

L’unification des fichiers dédiés aux passeport et aux cartes nationales d’identité touchera plus de 60 millions de Français. La liste des données personnelles d’identification qui pourront y être enregistrées est très vaste :

Dans son cœur, évidemment l’état civil, mais aussi la couleur des yeux, la taille, l’adresse, la filiation des parents, l’image numérisée du visage et en principe des empreintes digitales de tous les Français. S’y ajouteront l’image numérisée de la signature du demandeur, l’adresse email et les coordonnées téléphoniques du demandeur qui passe par une procédure à distance, le code de connexion délivré par l’administration, etc.

  • état civil complet
  • couleur des yeux
  • taille
  • adresse
  • filiation des parents
  • image numérisée du visage
  • image numérisée des empreintes digitales
  • image numérisée de la signature du demandeur
  • adresse mail
  • code de connexion délivré par l’administration
  • coordonnées téléphoniques du demandeur
  • numéro du titre
  • tarif du timbre
  • traces potentielles d’une perte, d’un vol ou d’une interdiction de sortie de territoire
  • mention des justificatifs présentés pour la demande
  • Informations à caractère technique relatives à l’établissement du titre
  • image numérisée des pièces du dossier de demande de titre
  • etc…

Seule différence avec 1940, le texte prévoit une interdiction d’exploitation du fichier global par un moteur de recherche « permettant l’identification à partir de l’image numérisée du visage ou de l’image numérisée des empreintes digitales enregistrées dans ce traitement. »

Maigre consolation, sachant qu’une loi telle que celle-ci est susceptible d’évoluer… En l’état, elle permettra notamment de comparer de manière automatisée par l’administration les données biométriques de chaque demandeur avec celles précédemment enregistrées sous la même identité pour déceler les indices d’une possible fraude.

Notons tout de même que le taux de fiabilité d’une comparaison d’empreintes digitales est d’environ 97 %d’après la CNIL. Le problème de ce système dédié à l’administration est qu’il sera accessible sous condition aux autorités : 

« L’ensemble des données contenues dans TES, y compris des données biométriques, pourront, comme l’ensemble des données contenues dans des fichiers administratifs, faire l’objet de réquisitions judiciaires ». Il pourra donc y avoir une part d’identification via TES, sur demande d’un juge. Un rappel signé de la CNIL qui a fait publier sa délibération sur ce texte

La CNIL ajoute que « les données biométriques présentent la particularité de permettre à tout moment l’identification de la personne concernée sur la base d’une réalité biologique qui lui est propre, qui est permanente dans le temps et dont elle ne peut s’affranchir. Ces données sont susceptibles d’être rapprochées de traces physiques laissées involontairement par la personne ou collectées à son insu et sont donc particulièrement sensibles ».

france-biometrieLe dit fichier sera accessible par les services centraux du ministère de l’Intérieur chargés des titres, mais aussi par les préfectures, les services du renseignement ainsi que les douanes, la Police et la Gendarmerie nationale. S’ajoute à cela l’échange de certaines informations du fichier avec les autorités étrangères (perte de titre, identification, etc) ainsi qu’avec Interpol et le SI Schengen. Bref, cela fait beaucoup de monde, surtout en rapprochement aux récentes évolutions dédiée à la lutte antiterrorisme…

Les données du fichier sont conservée 20 ans, durée réduite à 15 ans pour les mineurs. Seuls les moins de 12 ans passerons à l’as.

La CNIL avait pourtant demandé en 2012 que ces informations soient stockées plutôt dans une puce électronique intégrée au cartes nationales d’identité et aux passeport au lieu d’être centralisées dans un fichier. Ainsi, chacun aurait été maître de ses données et le fichage n’aurait pas été possible. Néanmoins, cela aurait stoppé la fraude, tout en respectant la vie privée des citoyens français et en évitant tout détournement :

« La puce permettrait de conserver les données biométriques sur un support individuel exclusivement détenu par la personne concernée, qui conserverait donc la maîtrise de ses données, réduisant les risques d’une utilisation à son insu ».

Malheureusement, le gouvernement Valls a préféré la manière forte en instaurant une base unique, centralisée, « présentant davantage de risques au regard de la protection des droits et libertés ».

 

Source : NextInpact

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