Airbnb accusé de faciliter la fraude fiscale via carte bancaire prépayée offshore

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Alors que le gouvernement chasse les utilisateurs du controversé Airbnb, voilà qu’une nouvelle accusation fait surface : le service est accusé d’encourager la fraude fiscale des propriétaires de logements en proposant le versement des gains sur une carte bancaire prépayée émise depuis Gibraltar.

Beaucoup de médias ont mis aujourd’hui cette information en avant, avançant que Airbnb ferait tout pour encourager ses utilisateurs à frauder le fisc concernant leurs revenus locatifs… est-ce réellement le cas ?

Tout part de la mise à disposition sur le site Airbnb d’une carte bancaire prépayée rechargeable Payoneer. Très à la mode, ce type de produit bancaire alternatif dispose de beaucoup d’avantages pratiques et sécuritaires et parfois même, tarifaires !

Radio France est à l’origine de l’information et de l’accusation envers Airbnb. La CB Payoneer en question, est personnalisée aux couleurs de Airbnb et émise depuis Gibraltar. Pour verser à ses “hôtes” (donc aux propriétaires d’appartements) les gains des locations, Airbnb propose deux solutions au choix : soit par virement bancaire, soit par approvisionnement de carte prépayée Payoneer.

Aujourd’hui, il s’avère que l’immense majorité des utilisateurs choisit le virement bancaire. Les autres optent pour la MasterCard rechargeable Payoneer, qui est en accord avec la plateforme depuis 2014. La société dispose de plus de 4 millions de clients dans le monde.

Airbnb propose la souscription à la carte sur son site, et sans frais. La plateforme ne vérifie pas l’identité du propriétaire, et demande un simple numéro de passeport pour la création de la carte de paiement.

Pour un résident français, un tel dispositif permettrait échapper aux impôts sur ses gains. Pourquoi ? Car une carte bancaire prépayée de ce type émise en offshore est totalement opaque : le paiement Airbnb est émis depuis le Royaume-Uni et va directement sur la CB Payoneer vers Gibraltar. Discrétion assurée donc, surtout que grâce à l’absence de compte bancaire, cela échappe aux accords d’échange d’informations entre Gibraltar et la France.

D’ailleurs, Bercy a confirmé aux journalistes que ces paiements étaient invisibles pour eux.

Comment les fonds sont ensuite utilisés par les détenteurs de CB ? Facile, il suffit de procéder à des retraits de cash réguliers via des distributeurs de billets en exploitant les haut plafonds de retrait autorisés, ou bien d’utiliser la CB pour payer ses achats comme avec n’importe quelle carte bancaire. L’option peut donc être attirante pour les gros loueurs Airbnb. Rappelons que la loi française oblige les propriétaires à déclarer les revenus provenant de plateformes comme Airbnb dès le premier euro, avec des charges spécifiques à partir de 32 900 euros annuels, car étant alors considérés comme des professionnels.

Airbnb a bien entendu réagit à l’accusation et se défend sur la nature de la care prépayée en question :

Payoneer n’est pas spécifiquement utilisé par Airbnb, mais propose des services de paiement similaires à de nombreuses entreprises dans le monde.

Airbnb France en profite pour rappeler que l’ensemble de ses hôtes doivent respecter les réglementations (et donc les règles fiscales) et qu’une page dédié existe à titre informatif. La société ajoute qu’un document fiscal de référence annuel est mis à disposition de tous les hôtes afin de simplifier leur déclaration d’impôt.

Quand on sait que certains loueurs Airbnb peuvent atteindre voir dépasser les 100 000 euros annuels versés sur leur carte Payoneer, ça laisse à réfléchir et démontre que l’évasion fiscale peut se faire encore très simplement aujourd’hui, sans passer par de coûteux montages risqués. D’autant que les formalités d’accès à la CB sont très légères.

Les députés français avaient proposé l’année dernière de voter une loi imposant à Airbnb de transmettre les revenus des loueurs au fisc. Le secrétaire d’État au Budget, Christian Eckert, avait alors donné un avis défavorable, avançant des « problèmes techniques » et refusant de freiner le développement du secteur, par un excès de réglementation. La mesure, qui devrait néanmoins finir par être appliquée, est reportée à 2019 voire 2020, et le gouvernement actuel avance doucement sur la question.

Le débat fait rage en tout cas, surtout lorsque l’on connait le taux d’imposition record en France, vice-championne des taxes en tout genre par rapport aux pays de l’OCDE !