Quand les hackers s’attaquent aux élections

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A l’occasion des élections du parti Les Républicains, les 20 et 27 novembre prochains, la Haute autorité pour la primaire de la droite a autorisé le vote électronique pour les Français vivant à l’étranger. Cette décision a été prise malgré certaines réticences quant à la garantie de la sécurité. C’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles le concept du vote électronique n’est pas encore très développé en France et non-applicable à l’élection présidentielle, même pour les Français établis à l’étranger.

usa-modelTribune par Alfredo Ortega, Développeur Back-end chez Avast – Certains pays, où ce système est plus répandu, ont été confrontés à des problèmes de sécurité. Des hackers ont par exemple récemment pris le parti de jouer un rôle actif dans l’élection présidentielle américaine. Ils n’ont pas seulement mis en lumière le triste état des machines de vote électronique obsolètes et peu sécurisées, ils ont également fait en sorte de semer le doute sur les résultats de l’élection, et tenté de saper la confiance des citoyens dans la démocratie américaine.

A la suite de ces attaques, certains chercheurs pointent du doigt la Russie. Pourtant un pirate informatique solitaire aurait pu commanditer ces piratages depuis sa chambre. Pour améliorer les systèmes et machines de vote, il faut d’abord saisir les intentions des cybercriminels, leurs méthodes et prendre les mesures nécessaires appropriées.

 

Pour Alfredo Ortega, Développeur Back-end chez Avast, le constat est sans appel :

« Pour avoir déjà été en mesure d’infiltrer un système de vote, je peux vous dire que ce n’est pas si difficile du fait que tout système numérique est piratable. En revanche, les gouvernements doivent comprendre le but recherché par les hackers pour pouvoir analyser les attaques et trouver des solutions efficaces et durables pour s’en protéger.logo-avast

Il existe de nombreuses façons de manipuler les systèmes de vote sans avoir à toucher aux bulletins physiques ou aux machines. Aux Pays-Bas par exemple, bien que les appareils électroniques ne soient pas connectés à internet, les pirates peuvent lire le vote d’une personne à 30 mètres de distance et sans fil, en utilisant une petite antenne pour écouter les émissions radio de la machine. Autrement dit, ce système ne garantit pas l’anonymat de l’électeur. Lors du piratage – toujours à distance – des systèmes de vote dans l’Illinois aux Etats-Unis, les hackers semblaient plutôt vouloir voler les informations stockées dans les machines, et non les modifier. Ils ont réussi à extraire près de 200 000 données personnelles d’électeurs, et paraissaient être à la recherche des historiques de vote pour voir s’ils avaient la possibilité d’influencer les futurs bulletins via des pots de vin ou de menaces.

Pour qu’un système de vote soit efficace, il faut que la partie battue reconnaisse sa défaite, or les résultats des machines sont souvent remis en cause. Les bulletins en papier permettent de démontrer la légitimité des votes alors que les résultats d’un système purement numérique ne peuvent être confirmés et demeurent incertains. Le soupçon d’un piratage sera toujours présent, permettant au vaincu d’utiliser cet argument pour critiquer le nouvel élu, ou même tenter de le corrompre en échange de son silence. C’est ainsi qu’un système de vote peu fiable affaiblit la démocratie.

Les gouvernements doivent partir du principe que les machines ne seront pas piratées le jour de l’élection, mais des mois voire des années avant. Les cyber-menaces sont de plus en plus agressives et si les pays ont pour le moment évité le pire, ils doivent se préparer pour l’avenir. Aujourd’hui, la seule véritable défense contre les attaques serait de ne plus utiliser de système électronique, ce qui parait impossible pour des nations telles que les États-Unis. En revanche, elles pourraient développer des machines qui impriment de façon automatique et centralisée les résultats de chaque vote électronique sur des bulletins physiques auxquels se reporter lors du dépouillement ou en cas de contestation. Même si une élection à base de papier peut toujours être “piratée”, c’est aujourd’hui l’option la plus sécurisée dont nous disposons. Si la France décide d’appliquer le vote numérique aux élections présidentielles, les politiques et les organisations compétentes devront impérativement assurer l’accès à des appareils hautement sécurisés et fiables au risque de mettre le système démocratique français en péril. »

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