Un simple email ne vaut rien pour la Cour de cassation, et Hadopi ?

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Dans le cœur d’Hadopi, l’e-mail est la première marche de la fameuse réponse graduée. Un récent arrêt de la Cour de cassation risque cependant de jouer les trouble-fête dans cette graduation.

D’abord un rappel. Dans Hadopi, le mécanisme commence par le repérage d’un fichier mis à disposition. L’adresse IP est relevée puis un message d’avertissement est envoyé au titulaire de l’abonnement Internet « par la voie électronique » via le fournisseur d’accès.

En cas de renouvellement des faits dans un délai de 6 mois à compter de l’envoi de la première recommandation, donc envoyée par email, la Hadopi peut adresser une nouvelle recommandation par la voie électronique et/ou par une lettre recommandée avec accusé de réception (« ou de tout autre moyen propre à établir la preuve de la date d’envoi de cette recommandation »).

En cas de troisième itération dans l’année suivant l’envoi par lettre recommandée, le dossier peut être transmis au Parquet en vue d’un éventuel procès.

Le schéma est résumé par la Hadopi ainsi :

 

La Cour de cassation a cependant rendu un arrêt le 30 septembre dernier qui rappelle les grands principes des règles de l’écrit électronique et de la preuve de sa validité. L’affaire opposait un bailleur et une locataire. Cette dernière opposait au premier un simple email dans lequel celui-ci s’était entendu avec elle sur le délai de préavis du bail. Le bailleur lui contestait la validité de ce simple email.

Le principe de validité et de la preuve de l’écrit électronique

La Cour d’appel de Dijon avait admis comme preuve cet émail, mais pas la cour de cassation. Celle-ci rappela solennellement les grands principes en la matière, qu’on retrouve dans l’article 1316-4 du code civil : « lorsqu’elle est électronique [la signature] consiste en l’usage d’un procédé fiable d’identification garantissant son lien avec l’acte auquel elle s’attache. La fiabilité de ce procédé est présumée, jusqu’à preuve contraire, lorsque la signature électronique est créée, l’identité du signataire assurée et l’intégrité de l’acte garantie, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État ». Ici, sans signature électronique démontrant l’identité du signataire et l’intégrité du document, l’email ne vaut rien.

Conclusion ? Si ces principes sont étendus à Hadopi, la première marche de la réponse graduée pourrait tout simplement être effacée, et avec elle les premières vagues d’avertissements. Certes, la Hadopi « peut » ou « peut ne pas » envoyer un courrier, mais comment pourra-t-elle calculer le premier délai de 6 mois si elle ne peut sereinement démontrer l’envoi de la première salve ?

 

Source : PCInpact, Marc Rees

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