Opera – Le navigateur Web sera bientôt chinois ?

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Opera Software était jusqu’à maintenant norvégien et outsider sur le marché des navigateurs Web. Un consortium chinois fait une proposition de rachat s’élevant à un montant de 1,2 milliards de dollars pour mettre la main sur Opera. Quelle est le but de la manœuvre ?

Il n’est pas bien difficile de voir le jeu que joue la Chine à travers cette récente proposition de rachat à 1,2 milliards de dollars du principal outsider des navigateurs Web face aux géants Edge (Microsoft), Chrome (Google), Firefox (Mozilla) et Safari (Apple). Il s’agit d’un consortium de firmes chinoise qui en est à l’origine, constitué notamment de Kunlun et Qihoo 360, soutenus par les fonds d’investissement Golden Brick et Yonglian.

La direction d’Opera soutient une acquisition avec une logique stratégique et industrielle, après une première annonce de volonté de trouver repreneur dès le mois d’août 2015 :

« Il existe une forte logique stratégique et industrielle à l’acquisition d’Opera par le consortium » commente le PDG d’Opera, Lars Boilesen. « L’appartenance au Consortium renforce la position d’Opera pour servir nos utilisateurs et partenaires avec une encore plus grande innovation, et accélérer nos projets d’expansion et de croissance. »

Le prix que le consortium chinois est prêt à débourser pour acquérir Opera peut paraître élevé au regard de la part de marché que son navigateur occupe aujourd’hui et ses 20 ans d’expérience. Selon les statistiques établies par NetMarketShare, le logiciel ne compte que pour 1,58 % du marché des navigateurs sur PC en janvier 2016. Mais c’est sans compter la place qu’occupe Opera sur les terminaux (smartphones et les tablettes principalement) qui est de 8% environ.

Notons que les inconditionnels d’Opera ont largement abandonné  le navigateur après sa version 12, qui est une étape fatidique : l’adoption de Chrominium… le même moteur derrière Chrome et Firefox.

« Notre conseil d’administration a entrepris un examen attentif des termes et conditions de l’offre et est unanime dans sa recommandation. Nous félicitons l’équipe de direction pour le travail qu’elle a accompli au nom des actionnaires, des employés et des autres parties prenantes d’Opera » commente le président d’Opera, Sverre Munck.

Pour le compte du consortium, Yahui Zhou, PDG de Kunlun a réagi : « Opera est une société de l’Internet mobile bien connue bénéficiant d’une marque forte et à l’impact mondial. Grâce à son excellente équipe de management, Opera a accompli des réalisations remarquables au cours des dernières années dans les domaines de navigateur mobile et de la publicité mobile. »

Une volonté technologique anti-américaine

Il faut comprendre la logique de la Chine : la volonté de s’offrir une technologie logicielle et Web bien à elle, afin de ne plus dépendre de la technologie américaine. En effet, l’empire du milieu souhaite échapper à la mainmise des multinationales américaines sur Internet en disposant d’une alternative crédible. Elle a pour cela bloqué le moteur de recherche Google ce qui en fait le seul pays du monde à avoir trois moteurs de recherches nationaux : Baidu, Haosou, Soguo Search totalisent 90% du marché.

La Chine cherche aussi à développer des systèmes d’exploitation rivaux de Microsoft, Google ou Apple. Pour les ordinateurs, le ministère de l’industrie et des technologies de l’information pousse l’utilisation de Kylin, le système d’exploitation de l’armée chinoise développé à partir de Linux. Pour contrer les “systèmes étrangers” tel Android ou iOS pour les terminaux les mobiles, l’Institut du logiciel de l’Académie chinoise des sciences a édité COS (China Operating System). Kylin ou COS n’ont pour l’instant pas remporté l’adhésion du grand public, Windows domine les PC à plus de 95% et Android détient 74,9% du marché des mobiles, suivi par iOS (23,14%).

Pour finir, le pays a eu plus de succès dans les réseaux sociaux où Facebook est concurrencé par Qzone, Weibo ou Renren. Quant au e-commerce, les Chinois plébiscitent Alibaba au détriment d’Amazon ou eBay.

Publicité mobile, l’autre atout d’Opera

Précurseur de la navigation sur les téléphones potables avec une méthode de compression accélérant le chargement des pages, le norvégien Opera s’est ensuite diversifié dans la publicité mobile. Une activité qui représentait même 75 % des 193 millions de dollars de recettes du dernier trimestre 2015 ! « C’est surtout cela que les Chinois achètent », avoue Tristan Nitot, directeur produit chez Cozy Cloud et ancien président de Mozilla Europe.

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